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XIII

L’hiver était parti, et le soleil entrait de nouveau dans l’atelier. Mais si le printemps faisait l’air plus doux et chargeait de fleurs les marronniers de l’avenue, il semblait emporter jour par jour toute la fraîcheur et toute la gaîté de Gabielle. Elle-même ne comprenait rien à l’état de langueur qui lui rendait le travail pénible et lui ôtait toute envie de rire. Ses lèvres si roses étaient maintenant sans couleur et l’ombre qui entourait ses yeux faisait paraître ses joues encore plus pâles.

Chacune de ses compagnes croyait connaître le remède qui pouvait conjurer son dépérissement et les conseils ne lui manquaient pas :

— Buvez sur la sauge et la petite centaurée, lui criait Félicité Damoure.

Et elle énumérait ensuite une si grande quantité de plantes à joindre à celles-ci, que le patron s’amusait à les lui faire répéter à la file, sous prétexte d’en retenir les noms. Bergeounette conseillait surtout le bruit et le mouvement. Et Duretour, qui n’aimait pas les tisanes, assurait que seul un fiancé pouvait ramener la belle santé que Gabielle avait perdue.