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mettait du rouge aux joues et ses rides paraissaient moins creuses.

Cependant, lorsqu’elle eut dit tout au long la joie de ce jour lointain, elle ramena ma pensée vers Clément.

Nous savions par Mme  Dalignac qu’il viendrait en permission pendant les fêtes et qu’il profiterait de ce temps pour parler d’une chose très sérieuse qui engagerait toute sa vie.

Le patron s’était moqué au reçu de la lettre de Clément :

— Té ! c’est clair, il va t’annoncer qu’il est amoureux d’une belle jeune fille et qu’il veut se marier.

Mme  Dalignac n’avait rien répondu, mais son regard était devenu fixe comme si elle cherchait à voir au loin la belle jeune fille que son neveu avait choisie.

Était-ce moi ? comme il me l’avait assuré lors de sa visite, et comme le désirait si ardemment Mlle  Herminie. Un doute me venait. Je n’avais pas revu Clément quoiqu’il fût venu plusieurs fois en permission depuis ce jour-là. Et si, dans ses lettres à Mme  Dalignac, il parlait des ouvrières, mon nom n’était pas cité plus souvent que celui de Duretour ou de Bergeounette. Je n’en ressentais ni ennui ni joie. Rien ne m’éloignait de Clément, mais rien non plus ne m’attirait vers lui, et s’il n’avait pas été le neveu de Mme  Dalignac, j’aurais eu vite fait de l’oublier.