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chien qui aboie furieusement après de pauvres gens qui passent trop près d’une maison bien gardée. L’aboiement se ralentissait pour reprendre l’instant d’après, et Bergeounette regardait constamment vers la fenêtre, comme si elle espérait voir passer Joseph et Marie.

Au dehors, le roulement des voitures s’espaçait. C’était maintenant, sur l’avenue, le piétinement des groupes qui revenaient de la messe de minuit. Et tout à coup, deux voix discordantes s’élevèrent pour chanter :


    Il est né, le divin enfant.

Gabielle se mit à rire. Tous les visages prirent un air de contentement comme à l’annonce d’une grande joie et bientôt l’atelier s’emplit de bavardages et de chant.

Presque toutes gardaient un Noël au fond de leur mémoire. La grande voix de Bouledogue fit entendre un air enfantin qu’elle avait appris à l’école, et personne ne se moqua de celui que Roberte entonna d’une façon tout à fait ridicule.

La douce voix de Mme  Dalignac s’éleva aussi, et je me souvins moi-même d’un Noël où l’on voyait les bergers solognots quitter leur troupeau pour aller porter des présents à l’enfant divin.


    Sylvain lui porte un agnelet,
    Son petit-fils, un pot de lait
    Et deux moineaux dans une cage.
    Robin lui porte du gâteau,
    Pierrot lui porte du fromage
    Et le gros Jean, un petit veau.