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gré son ennui de ne pas réveillonner dans la famille de son fiancé.

Roberte et Félicité Damoure arrivèrent ensemble toutes recroquevillées par le froid. Puis ce fut Gabielle, les mains dans les poches de sa jaquette, et rejetant son souffle comme si elle avait trop chaud. Bouledogue entra, le nez tout plissé et les dents à l’air. Et, comme toujours la dernière de toutes, Bergeounette se précipita avec sa turbulence et son air évaporé.

Lorsque Mme  Dalignac eut avancé ou reculé les lampes pour que chacune fût satisfaite, le travail reprit en silence.

Un roulement de voitures montait de l’avenue et les tramways faisaient grincer les rails.

Des bandes de jeunes gens descendaient de Montrouge en chantant à pleine gorge. Et dans les minutes d’accalmie, on entendait démarrer un fiacre dont l’une des roues râpait le bord du trottoir, tandis que les rires des femmes se mêlaient aux claquements fêlés des fers du cheval.

À mesure que la soirée s’avançait, nous apportions plus d’attention aux bruits du dehors. De temps en temps l’une de nous laissait échapper un gros soupir, et on ne savait pas si ce soupir s’en allait plein de regrets vers la fête ou s’il était causé par la fatigue de la veillée.

Un peu avant minuit, Bergeounette fit entendre une sorte de chant très lent et triste comme une plainte. Aussitôt Duretour se moqua :

— Voilà un air gai pour le réveillon.