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— Oui, madame.

— Toutes neuves.

— Oui, madame.

— Il me faudra du temps pour les payer.

— Oui, madame.

Le ton du marchand était plein de déférence et il fermait les yeux en inclinant le buste à chaque réponse.

Mme  Dalignac ne s’informa ni du prix des machines ni des conditions de paiement. Elle dit seulement tandis que le juif se levait pour partir :

— Je ne payerai peut-être pas régulièrement, mais je payerai sûrement.

Le marchand leva les deux mains en souriant pour montrer son entière confiance, et avant de sortir il salua si bas qu’une mèche de ses cheveux s’échappa, et se balança comme un pompon.

Les machines furent livrées le jour même et il y eut bientôt une quinzaine d’ouvrières à l’atelier.

Mme  Dalignac ne pouvait plus suffire à la coupe. Je l’aidais et nous restions souvent très tard à préparer l’ouvrage du lendemain. Il nous fallut aussi établir les prix à payer pour chaque modèle. Ce fut une grosse difficulté. Je ne savais pas compter non plus, et nous arrivions à si bien embrouiller nos chiffres que le fou rire nous prenait devant notre maladresse. Mme  Dalignac se décourageait parfois et disait : « Ah ! si mon mari était là. » Enfin, après un nombre considérable de recommencements, les prix furent fixés, et le