Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/98

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il serre davantage les grandes mains froides et répond sans détourner les yeux :

— Non.

Ils se quittent. Après quelques pas ils se retournent et font, l’un vers l’autre, le même geste de fatalité.

Pour ne pas aggraver le mal qu’il sentait sourdre autour de lui, Noël a pris du travail chez un oncle, frère de son père et fermier dans un village, non loin de Bléroux. Il revient chez ses parents le samedi soir, mais ses dimanches, comme par le passé, appartiennent à Églantine. Il faut les voir partir dès le matin à travers champs et bois. Mère Clarisse bourre leurs poches de pain et de fruits, sachant bien que, dans leur félicité, ils oublieront l’heure du repas. Pour la remercier Églantine, redevenue gamine, tourne autour d’elle en chantant ce qu’elle leur a chanté tant de fois :


    Berger, mon doux berger
    Qu’aurons-nous à souper ?
    Un pâté d’alouettes
    Du vin de nos côteaux
    Un morceau de galette
    Caché sous mon manteau.


Ils ont délaissé l’étang pour la rivière