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ils avaient devant eux une grande chambre, blanchie à la chaux, meublée d’un lit, d’une vaste armoire à ferrures ouvragées, et d’une lourde commode, à dessus de marbre blanc, contre laquelle s’appuyait un joli berceau d’osier fin. Le berceau, tout comme le lit, était recouvert d’une toile bise qui traînait jusqu’à terre. Et sur le marbre poussiéreux de la commode, au milieu des bibelots dont il était encombré, se haussait un grand cadre doré contenant la photographie en couleurs de deux jeunes mariés. La mariée, très blonde et de petite taille, montrait un visage enfantin. Elle souriait autant avec ses yeux bleus qu’avec ses lèvres roses, tandis que le marié, très jeune aussi, avait un visage pâle, grave et résolu. Une épaisse mèche de ses cheveux, échappée de la masse, retombait sur son front et faisait penser à une aile brisée. Et, sous les sourcils très allongés vers les tempes, on voyait des yeux immenses dont le regard était comme perdu au loin, des yeux qui semblaient pouvoir s’agrandir encore et envahir tout le visage :

— Le marié a des yeux comme toi ! dit Noël.

Il mit le cadre dans les mains de Douce.