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prétexte de marcher par les rues, il accompagne Églantine jusqu’à l’église où elle doit chanter, et bien souvent elle le retrouve à la sortie. Jamais pour Tensia il n’avait connu cet état de méfiance qui lui mettait aux yeux une colère lorsque le regard d’un passant s’arrêtait sur sa compagne. Elle-même ne s’apercevait de rien, n’ayant aucun désir de plaire. Elle allait, ainsi que toujours, de son pas rapide, la tête haut levée, comme quelqu’un qui cherche un visage ami dans la foule. Jacques se tenait très près d’elle, et il ne pouvait s’empêcher de lui répéter les paroles de Mlle Charmes :

— Douce Lumière, prenez garde à votre beauté.

D’où lui venait donc cette beauté singulière ? Où avait-elle pris ces yeux qu’on ne voyait à personne ? Ces lourdes paupières qui se relevaient lentement comme avec le regret de laisser voir à tous les trop larges prunelles qu’elles étaient chargées de recouvrir et garder pour un seul ?

Un soir de veillée, après une conversation affectueuse sur l’avenir, où leurs deux vies resteraient liées à celle de Christine, Jacques Hermont osa poser des questions à Églantine. Il devenait jaloux aussi de son