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autres qui comptaient bien pêcher jusqu’au retour de la marée. Tandis que Marie-Danièle s’attardait auprès de Raymond, je partis en courant pour me réchauffer, et, comme j’ouvrais la porte de la maison, juste, je vois la Dame Blanche. Elle se tenait toute droite, le dos collé à la porte du fond. Vous savez, la porte verte ? J’ai eu peur, oh ! que j’ai eu peur ! J’ai cru que mon cœur allait se sauver tant il faisait des bonds ; puis, comme je restais sur le seuil, un fort coup de vent a secoué le mûrier, et aussitôt la Dame Blanche s’est mise à danser. Elle dansait comme une dame prise de folie, et pourtant elle n’avait pas de pieds. Elle s’est calmée en même temps que l’arbre reprenait sa tranquillité. À ce moment j’ai compris que c’était l’ombre du mûrier qui s’agitait sur la grande tache blanche que faisait dans la maison le clair de lune, une tache plus blanche encore que le linge lavé par Marie-Darnièle. Alors je me suis mise à rire très fort, aussi fort que j’avais eu peur, tandis que mon cœur se reposait et que ma peur se sauvait bien loin. Marie-Danièle a dû être surprise aussi en arrivant. Elle a fait un pas de recul avant d’entrer, et elle a étendu le bras comme pour me protéger. Elle ne m’a