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En rentrant du fournil je repris ma place au coin du feu où je retrouvai le même silence et la même attente. Oncle meunier tardait bien à revenir. Aucun de nous n’en faisait la remarque ; mais, lorsque la vieille horloge eut toussé onze heures, tous les regards se portèrent sur son cadran pour s’assurer qu’elle ne se trompait pas.

Un peu avant minuit, oncle meunier que nous n’avions pas entendu venir du dehors ouvrit enfin la porte en nous souhaitant le bonsoir.

Tout l’inconnu qu’il rapportait de son voyage nous immobilisa et nous empêcha de lui répondre. Il eut le sourire qui faisait sa bouche si pareille à celle de notre mère, et il dit :

— Tout va bien ; vous allez rester ici et vos parents viendront passer la journée de dimanche prochain avec vous.

Il s’assit, prit les jumeaux sur ses genoux et se mit à les bercer lentement.

Il reprit, à l’adresse de Firmin qui restait le visage levé vers lui :

— Mais oui, tout va bien.

Et, l’instant d’après, les jumeaux endormis contre sa poitrine, il parla plus bas :

— C’est bien vrai que vous auriez dû vivre par moitié chez vos parents, mais il se trouve que ni l’un ni l’autre ne peuvent maintenant se charger de vous.

Après le silence qui suivit oncle meunier nous fit connaître ses projets d’avenir :

Pour les jumeaux et moi, rien ne serait changé, mais Angèle allait sans retard apprendre un métier et puisque Firmin était trop faible pour tra-