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parler avait retenu le nom du visiteur sans se douter qu’il était un parent. C’était elle qui disait vrai. C’était elle qu’il fallait croire. Subitement debout, Valère s’était approché de la gentille brune pour l’interroger, mais elle lui avait tourné le dos avec mépris. Rentré chez lui avec l’intention d’écrire tout de suite à Firmin il n’en avait cependant rien fait. Comment avouer à son ami que chacune de ses lettres avait été jetée au feu sans être ouverte ?

Et comme les jours passaient le laissant indécis, oncle meunier était arrivé avec la mauvaise nouvelle. Alors, fou de regret, pensant que tout était perdu, il avait cherché l’oubli de ses torts dans l’ivresse quotidienne. Puis, ces jours derniers, au reçu d’une lettre dans laquelle Firmin parlait de son mariage accompli et de son espoir d’être heureux malgré tout, il avait tout quitté sur l’heure pour revoir cet ami si indulgent et si fidèle.

Et maintenant Valère parlait de liquider ses affaires de Nice pour venir s’installer à Paris où il se sentirait protégé par Firmin et moi, les seuls qui l’avaient aimé et dont il n’aurait jamais dû se séparer. Je n’avais aucun désir d’une nouvelle visite de Valère, cependant lorsqu’il partit, je lui tendis la main :

— Au revoir, Valère Chatellier.

À peine s’il toucha le bout de mes doigts, mais dans les yeux mornes et décolorés qu’il leva sur moi, une toute petite clarté trembla.


Il pleut, il fait soleil. La pluie est douce, le soleil est doux, et les vitres de ma fenêtre se sont