mon enfant d’un mal pour le jeter dans un autre. Était-ce donc parce que j’avais eu faim moi-même que mon petit ne pouvait plus s’alimenter maintenant ?
La sage-femme d’un ton bourru, m’assura du contraire :
— Vous n’y êtes pour rien, l’enfant a une malformation de l’estomac.
Disait-elle la vérité ?
Je ne pouvais oublier sa remarque sur la maigreur du nouveau-né.
Mon remords vint augmenter un malaise que j’éprouvais depuis mon accouchement et dont je ne parlais pas. C’était comme un ralentissement du cœur qui me faisait craindre de m’évanouir à tout moment. C’était surtout des nausées qui me donnaient la répugnance de toute nourriture. Je luttais contre cela, je ne voulais pas être malade, je voulais manger pour avoir du lait. Il me fallait beaucoup de lait afin que mon petit pût en prendre à tout instant sans risquer d’en manquer jamais.
Ma volonté ne put tenir contre le mal qui progressait, et bientôt une forte fièvre vint m’enlever en même temps que le remords le souvenir du lieu où je me trouvais. Pourtant, dans cet espèce d’oubli, la crainte de perdre mon lait persiste, car malgré la barre de fer qui me défonce le crâne, malgré les milliers de guêpes enragées qui bourdonnent à mes oreilles, j’entends mon petit pleurer la faim. J’entends aussi ce que disent les médecins : « Si l’enfant peut résister quelques mois on pourra tenter une opération. Dommage que la mère ait