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livre de la dette publique. En effet, 38 millions étaient possédés par des communes, des établissements publics et des institutions spéciales qui n’auraient su choisir un meilleur dépôt de leurs économies ; 25 millions étaient presque arrêtés dans les mains des porteurs par diverses clauses légales et restrictives ; 21 millions appartenaient à des étrangers qui, après les conversions déjà opérées par tous les peuples de l’Europe, n’auraient plus hors de la France un placement aussi utile de leurs capitaux ; enfin, les 80 millions qui forment le surplus de cette dette spéciale représentaient, à Paris pour 26 millions, et dans les départements pour 24 millions, des capitaux paisibles, presque immobilisés dans la caisse d’épargne des 5 0/0 par la prévoyance des familles qui s’y sont mises à l’abri des oscillations de la place, et qui n’en seraient pas sorties, sans doute, pour se livrer à des entreprises dont les intérêts élevés n’auraient pas couvert les chances de pertes.

Nous pouvons donc affirmer que la réussite de cette grande opération n’aurait été contrariée par aucun obstacle inhérent à la quotité ni à la nature du fonds à rembourser, mais qu’elle était subordonnée au cours naturel des circonstances, et à la juste appréciation que peut seul en faire le double intérêt du nouveau prêteur et de l’ancien créancier. C’est uniquement à ce jury spécial des propriétaires de capitaux, que l’opinion publique désigne comme les plus compétents dans cette nature d’affaires, qu’il faut demander un verdict sur la cause du Trésor et de ses créanciers, qui est celle de toute la France. C’est de ce concours, aussi habile qu’éclairé, que l’on doit attendre le succès d’une opération où la seule puissance du gouvernement pourrait l’exposer à des périls incalculables.