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tribune de la Chambre des pairs de ne mettre en vente les usines du gouvernement qu’avec des précautions particulières et qu’en vertu d’une loi spéciale. Toutes ces garanties ont été négligées ; une adjudication deux fois renouvelée avec publicité, mais trop précitamment conduite et sans un appel suffisant à la concurrence, a fait échoir, le 17 septembre 1841, à de puissants spéculateurs, cette propriété domaniale représentant pour l’État un capital de 40 millions, et produisant un revenu progressif déjà parvenu à 1, 600, 000 francs, pour un prix de vente de 7 millions.

La compagnie adjudicataire s’est empressée d’acquérir les sources salées, voisines de son exploitation, qui pouvaient lui opposer une rivalité dangereuse elle est ainsi parvenue à se procurer le monopole du marché si chèrement sacrifié par l’État sans aucune compensation pour le pays.

Cependant le perfectionnement successif de la voie publique a facilité les communications et réduit les frais de transport des sels de l’Ouest et du Midi, de manière à maintenir les prix de la région de l’Est au taux commun des autres parties de la France. Le kilogramme se débite à 20 et 2S centimes dans cette contrée du sel gemme ainsi que sur les divers points du territoire. On y obtient même une remise sur les achats faits en gros dans les entrepôts établis par la nouvelle compagnie.

Ainsi, quoique les dangers d’un monopole abandonné à l’intérêt privé aient été conjurés par la libre concurrence du commerce des sels français, le Trésor n’en a pas moins perdu, selon nos prévisions, au détriment de l’intérêt général et au profit de la spéculation particulière, un capital et un revenu considérables, en même temps