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en Saintonge, il nous a révélé une foule de détails intéressants, qu’on chercherait vainement ailleurs. Sa narration est simple ; c’est César plutôt que Tacite. Si les traits énergiques y sont moins fréquents, il y règne une certaine mélancolie qui est bien dans le ton et qu’on regretterait de n’y pas trouver. Malheureusement on y sent le sectaire ; il dissimule avec soin ce qui nuirait à son parti. L’impartialité est une vertu trop élevée pour qu’y puisse atteindre, du premier coup, celui qui a été victime des événements qu’il raconte. Mais en éclairant ses mémoires, impressions personnelles, à la lumière que nous apportent d’autres témoins oculaires, moins prévenus, plus dégagés de passions, on peut en tirer grand profit.

L’écrivain a un mérite remarquable, la naïveté. Mélange de finesse, de bonhomie et de force, son style plaît. Il ne frappe pas généralement par d’éloquentes pensées, par des mouvements passionnés. La poésie y est partout. Même dans les théories les plus ardues, dans l’expression des systèmes abstraits, il sait trouver l’image gracieuse et pittoresque qui les fait comprendre et saisir. Les métaphores sont le plus souvent tirées du soi. Il y met une justesse qui ravit. La raison, une raison rigide, austère, n’a jamais parlé une langue plus riche. Quand, dans ses discussions avec Théorique, il sent de la résistance, quand il voit l’outrecuidance de son adversaire ignorant, il s’impatiente, et le ton monte. Les arguments se pressent : les comparaisons s’accumulent ; la verve se donne carrière. Il faut que Théorique soit vaincue. S’il peint ses malheurs, c’est une élégie émouvante, qui vous