Page:Audet - Les députés de Saint-Maurice (1808-1838) et de Champlain (1830-1838), 1934.djvu/39

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 41 —

saient le service, ce qui fut l’occasion pour son ami Heney de lui faire un compliment fort flatteur. Ils faisaient presque tous les jours leur partie d’échecs vers la même heure. M. Heney était venu un peu plus tôt cette dernière fois et M. Vallières semblait se faire quelque peu désirer. Mme Vallières était allée le presser un peu et lui passer une robe de chambre en le grondant de sa paresse. Il entra dans ce déshabillé au petit salon où se faisait d’ordinaire leur partie et s’excusa de son mieux auprès de son vieil ami, en imputant toute la faute à ses jambes qui avaient presque refusé de le porter ce matin-là, ce qui l’avait retenu au lit.

Mon cher, repartit ce dernier, vous êtes comme la statue de Nabuchodonosor qui avait les pieds d’argile et la tête d’or.

Ce fut peut-être, dit-on, la seule fois que M. Vallières resta à court, mais il ne put reconnaître que par un sourire combien il était flatté du tour heureux que M. Heney avait donné en excuse de sa paresse apparente. »

Voici, pour terminer, le récit d’une aventure tragi-comique arrivée au juge Vallières durant son séjour aux Trois-Rivières. Je le tire du Bulletin des Recherches Historiques, dans lequel je le publiais en 1902 :

un juge en prison

Qu’un juge condamne quelqu’un à la prison, il n’y a là rien d’étonnant ; cela se voit tous les jours. N’est-ce pas, pour ainsi dire, son métier ? Ne doit-il pas punir les coupables et protéger la société contre les individus qui contreviennent aux lois que fait celle-ci pour la gouverne de ses membres ? C’est évidemment son devoir. Mais, qu’un juge soit lui-même condamné à subir une détention à la prison commune, voilà, certes, qui n’est pas banal ! Un événement de ce genre est bien fait pour piquer notre curiosité et attirer notre attention, ne serait-ce qu’un moment.

Qui était ce juge ? Où et quand ce fait extraordinaire s’est-il passé ? Nous allons répondre à ces questions en quelques mots.

Le juge qui fut victime de cet accident unique, croyons-nous, dans l’histoire du pays, était un homme distingué dans toute l’acception du terme ; c’était une lumière du Barreau, un des plus savants jurisconsultes qu’ait produits le Bas-Canada.