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« Vallières, doué d’un des plus nobles cœurs que Dieu se soit plu à créer, n’a jamais oublié la dette de gratitude qu’il devait à son généreux protecteur ; aussi, à l’encontre de la plupart des jeunes gens qui évitent, s’ils ne font pas pis, la société de ceux qui leur ont ouvert le chemin des honneurs et de la fortune, il se faisait un devoir de reconnaissance de rendre de fréquentes visites à son bienfaiteur ; et la mort seule de l’éminent prélat a mis fin à leur commerce d’amitié.

« — Tu es le bienvenu, lui dit un jour Monseigneur Plessis, qui tenait en ce moment un volume d’Horace dans sa main, j’ai beau tourner et retourner ce vers, il m’est impossible de croire que ce soit ce que l’auteur a voulu exprimer ; c’est un contre-sens.

« Vallières lit le passage et dit : C’est en effet ridicule. Mais après un moment de réflexion, il prend un crayon, pose deux points, ou un point et une virgule, et ajoute : Lisez maintenant, Monseigneur. Le sens était entièrement changé à l’avantage de l’auteur et des plus clair ; Monseigneur Plessis se plaisait à raconter cette anecdote de son jeune protégé.

« Vallières portait toujours dans sa poche un auteur latin ; et ni ses nombreuses occupations, ni sa vie un peu dissipée, comme la nôtre, pendant sa jeunesse, ne l’empêchaient d’en lire une page ou deux tous les jours. »

Nous ne savons si M. de Gaspé avait lu la vie du général de Chevert ; il nous raconte un fait qui ressemble beaucoup à celui cité par l’auteur français sur la jeunesse du célèbre général, expliquant comment un sergent recruteur avait découvert la vocation militaire du jeune Chevert, qu’il amenait comme demi-recrue au colonel de son régiment. Mais laissons encore une fois la parole à M. de Gaspé :

« Grand émoi, grande consternation parmi les autorités très soupçonneuses de la ville de Québec. On vient d’apprendre qu’un général de Napoléon est non seulement dans la cité, mais qu’il a même l’audace de recruter un régiment. Le Conseil exécutif s’assemble et on requiert la présence immédiate du prélat catholique. On lui fait sentir qu’il est assez surprenant qu’il puisse ignorer un fait aussi important ; et surtout qu’il n’en ait pas instruit les autorités. L’évêque interpellé répond que la chose lui