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filent à la barre. Allégueraient-ils de bonnes raisons, — juges et justiciables ne pouvant faute de parler la même langue se comprendre, — s’ils n’ont pris la précaution de payer l’interprète, celui-ci traduit le contraire de ce qu’ils disent et ils sont souvent condamnés.

Au milieu des accusations si fréquentes de vols, coups, blessures, de curieuses réclamations se produisent dans le prétoire. On entend, en effet, bientôt appeler la cause Yamina bent Aïssem, contre Larbi ben Ali.

Une mouquière, à la silhouette élégante, s’avance à la barre ; elle entr’ouve son haïck, seulement de façon à irriter la curiosité, et avec beaucoup de précision elle expose au tribunal que son mari ne l’a pas embrassée depuis six semaines ! Pour ce préjudice, ce délit, elle réclame cent francs de dommages-intérêts. Les juges goguenards paraissent trouver que le mari s’est assez puni lui-même.

Mais voici la contre-partie de cette affaire :

Un mari nommé El-Abib, dont la femme Messaouda vient de faire une fugue, réclame trois francs de dommages-intérêts pour chaque jour qu’elle a passé hors du domicile conjugal. Étant débouté de sa demande, il sort en proférant contre le juge cette malédiction si usitée en pays arabe :