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Lagdar ben-Djali, de la tribu des Oulad-Mokran, baptisée Rihana (vite comme le vent).

Car les chevaux, là bas, traités en personnes humaines, ont des noms, et les Arabes prennent certainement plus de soins à faire l’éducation d’un cheval que les Européens à faire celle d’un homme ; aussi parviennent-ils à développer en lui plus que de l’instinct, de l’intelligence. C’est ainsi qu’ils obtiennent du cheval qui vient de renverser son cavalier un arrêt immédiat. Le noble animal demeure comme un chien fidèle, près du cavalier blessé ou mort.

Rihana ne faisait pas seulement la joie de son propriétaire, elle était la gloire de sa tribu. Elle gagnait le prix aux courses, elle était acclamée dans les fantasias, elle savait se mettre à genoux et se lever toute droite sans inquiéter son maître.

L’administrateur de M… guignait ce beau cheval. La vue de celui que ramenait le gouverneur aiguisa son désir de le posséder. Enfin, n’y tenant plus, il s’approcha de son propriétaire :

— Lagdar, dit-il, combien veux-tu de ce cheval de sultan ?

— Il n’est pas à vendre, répondit Ladgar.

— Je sais que tu es à ton aise ; mais, voyons, pour me faire plaisir, estime-le un gros prix et cède-le-moi.