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nir pendant la route découle d’elle comme d’une éponge pressée... Elle a trop compté sur ses forces... Comme elle se sent le cœur retourné ! Heureusement, elle rencontre bientôt deux coreligionnaires, montées à mulet, qui la recueillent.

On descend à mi-côte, dans le repli de terrain où se tient le marché animé par le bêlement des moutons et des chèvres, les interpellations des vendeurs et des acheteurs, les à-savoir que font personnellement ceux qui ont perdu une bourse ou une bête.

En arrivant, chacun plante un pieu en terre et y attache son cheval ou son mulet. On frôle, on bouscule ces animaux au passage ; ils n’en restent pas moins calmes et inoffensifs.

Réïra, accroupie, les peaux de sa poitrine dans la bouche de son bébé, s’appuie à la tente d’un marchand de nouveautés. Oh ! elle ne voit plus les robes de tulle aux transparents multicolores, les ceintures de brocart, les babouches finement brodées qu’elle recèle. Tout tourne autour d’elle, comme quand elle a essayé un jour de danser la valse française. Se tiendra-t-elle seulement debout ? Le sol vacille sous ses pieds. Mais... le petit Ali qui ne ferme même plus les lèvres sur le sein flasque qu’il a dans la bouche ...

Elle titube en marchant ; un fonctionnaire qu’elle frôle la repousse brutalement de sa canne et en la