Comment vendre ses vaches à un particulier qui tient le sort des soixante-dix tentes du douar entre ses mains ! On est trop heureux de faire pour l’apaiser un sacrifice.
— Tiens, M. l’administrateur, prends ces vaches ! fais-les emmener ! Pour les autres, c’est 180 francs pièce ; pour toi, « c’est rien du tout. »
L’administrateur indigné éleva la voix.
— Pouilleux, s’écria-t-il, est-ce que je veux de tes vaches pour rien ? Ça crève de faim et encore ça parle de faire des cadeaux !
Avec autorité, il glissa une pièce de cent sous dans la main du vendeur, et il s’en alla au Cercle raconter aux autres fonctionnaires que les Beni-Gharabas avaient bien eu l’audace de vouloir lui donner les deux vaches qu’il avait achetées.
La vente des troupeaux permit de ravitailler la tribu ; pourtant, les embarras, la gêne reparurent bientôt.
On porta au marché les volailles : poules, dindons, pintades, qui vivaient librement dans le douar et l’animaient de leurs chants et de leurs gloussements ; seulement, la fatalité voulut que ce jour-là trois ou quatre fonctionnaires renouvelassent leur poulailler. Ils étaient, disaient-ils, venus acheter à eux de préférence, et ils s’appliquaient à bien leur montrer