Page:Auclert - Le vote des femmes, 1908.pdf/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
85
REVENDICATION DES FEMMES EN 1789

raison : l’enceinte où délibèrent les magistrats du peuple doit être interdite à tout individu qui outrage la nation ! … Et depuis quand est-il permis aux femmes d’abjurer leur sexe, de se faire hommes ? Depuis quand est-il d’usage de voir les femmes abandonner les soins pieux de leur ménage, le berceau de leurs enfants, pour venir sur la place publique dans la tribune aux harangues, à la barre du Sénat, dans les rangs de nos armées, remplir les devoirs que la nature a répartis à l’homme seul ? À qui donc cette mère commune a-t-elle confié les soins domestiques ? Est-ce à nous ? Nous a-t-elle donné des mamelles pour allaiter nos enfants ? A-t’elle assez assoupli nos muscles pour nous rendre propres aux soins de la hutte, de la cabane ou du ménage ? Non, elle a dit à l’homme : Sois homme ! les courses, la chasse, le labourage, les soins politiques, les fatigues de toute espèce, voilà ton apanage. Elle a dit à la femme : Sois femme ! les soins dus à l’enfance, les détails du ménage, les douces inquiétudes de la maternité, voilà tes travaux.

 

« Femmes imprudentes qui voulez devenir des hommes ! n’êtes-vous pas assez bien partagées ? Que vous faut-il de plus ? Vous dominez sur tous nos sens ; le législateur, le magistrat sont à vos pieds. Votre despotisme est le seul que nos forces ne puissent abattre, puisqu’il est celui de l’amour…

« Autant nous vénérons la mère de famille qui met son bonheur à élever, à soigner ses enfants, à filer les habits de son mari et alléger ses fatigues par l’accomplissement des devoirs domestiques, autant nous devons mépriser, conspuer la femme sans vergogne qui endosse la tunique virile et fait le dégoûtant échange des charmes que lui,