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le fit sourire ; car il avait faim. Bonjour, mon oncle, dit-il, à un vieillard frais et rosé qui fumait sa pipe assis sur le seuil de la porte.

— Tiens, c’est toi, Charles, rentre mon garçon ; tu es le bien venu ; tu arrives à propos ce soir ; les jeunes gens me présentent une grosse gerbe et nous allons avoir un divertissement ; tu ne seras pas de trop. D’où viens-tu ?

— De la ville, mon oncle.

— Ah ! Je suppose que tu es encore dans tes belles entreprises. Le mécontentement se peignit sur le visage d’Amand, le vieillard s’en étant aperçu ajouta : Allons, n’en parlons plus ; puisque ça te fait de la peine. Je suis sûr que t’es fatigué, viens prendre un coup. Ils avaient à peine fini leurs verres qu’ils entendirent les chants des habitans qui revenaient du travail après avoir terminé la moisson du bon homme. Suivant le cérémonial d’usage, le vieillard fut s’asseoir au fond de la chambre dans un grand fauteuil placé, pour l’occasion, et attendit d’un air joyeux et content, l’arrivée de ses enfans et de ses petits fils qui ne tardèrent pas à rentrer, en foule, précédés de l’aîné de la famille qui tenait d’une main un faisceau de superbes tiges de blé chargées de leurs épis et entourées d’une variété de boucles de ruban ; et de l’autre côté, une caraffe et un verre. Il s’avança jusqu’au siège du maître de la maison, lui présenta la gerbe, en lui souhaitant, chaque année de sa vie, une récolte aussi abondante ; après-quoi, il versa à boire à la compagnie. Le