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éclairé qui demeurait près de là ils résolurent de faire tous leurs efforts pour empêcher que la nouvelle ne lui parvînt, et en même tems, aviser quelqu’expédient pour s’assurer de sa personne.

Onze heures sonnaient lorsqu’une vingtaine de personnes partirent de la demeure du magistrat précédées d’une voiture et marchant dans le plus profond silence. Arrivées au but, la maison fut entourée et tous attendirent le dénouement de leur stratagème. Le jeune homme qui conduisait la voiture l’arrêta et frappa à la porte. Cinq minutes après, une voix forte demanda : Qui va  ?

— Je viens vous chercher pour la mère Caron qui a ben rempiré Mr. le Docteur ;[1] fut la réponse.

— Je suis malade, je ne puis sortir.

— Eh ben, elle demande si vous pourrez pas y donner de quoi la faire dormir ?

— Attends un peu. Cinq minutes après, le charlatan entr’ouvrait sa porte de manière à y passer le bras seulement et présentait une fiole. Le jeune homme avait bien joué son rôle jusque-là et n’avait pas reçu d’autres instructions ; car ceux qui lui avaient dicté ce qu’il devait faire croyaient que cela suffirait pour leur livrer celui qu’ils attendaient. Mais il sentit que le coup

  1. Je dois informer mes lecteurs que Lepage pratiquait la médecine, sans licence, depuis six mois dans la paroisse et jouissait d’une haute réputation d’habileté.