Page:Aubert - Paix japonaise, 1906.djvu/357

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dès 1603, Tôkyô, dont Ieyasu avait fait sa capitale, devient un centre d’art et de littérature ; les auteurs écrivent pour un public plus large, et l’école d’art nouvelle, dite populaire, rompt avec les habitudes ésotériques des écoles classiques. L’éducation se développe. Ieyasu, surtout après sa retraite comme inkyo à Shizuoka, favorise l’impression des vieux textes. En Italie, comme conséquence d’un semblable état politique et social, il y eut une Renaissance de l’antiquité ; au Japon, ce fut une Renaissance chinoise. La civilisation chinoise fut pour le Japon d’alors, comme l’antiquité latine et grecque pour l’Italie, un trésor de vérité objective et lumineuse qui répondait à tous les problèmes ; la langue chinoise est demeurée pour les Japonais, comme pour nous le latin ou le grec, un répertoire inépuisable de mots nouveaux, qui servent à désigner tous les phénomènes matériels ou scientifiques nouvellement connus. Les Kangakouça, philologues et érudits en matière chinoise, furent les Humanistes du Japon.

Tout ce mouvement de culture et d’art fut grandement aidé par l’habitude de se retirer du monde, de devenir inkyo, qui, adoptée d’abord par les grands et les nobles dans les temples, fut imitée par les gens de toute classe : ils se retiraient des affaires à quarante ans pour vivre selon leurs goûts, bibeloter, s’amuser, et faire des collections. La nation entière formait un public d’amateurs avertis.