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climat, un peu comme nos coloniaux construisent des villes ressemblant à nos sous-préfectures.

Loin du Japon ils ne trouvent plus à satisfaire leur besoin de sociabilité. Ils regrettent les auberges japonaises si joliment dispersées dans la campagne autour des villes ; ils regrettent la cuisine japonaise et les geishas qui chantent les légendes et les paysages japonais, comme beaucoup de nos concitoyens à l’étranger regrettent les cafés, les boulevards et la « vie parisienne ».

Il est évident qu’ils arriveront à sortir de chez eux. La victoire leur créera des obligations d’expansion. Leur population s’accroît. Européanisés, ils tiendront à faire comme les Européens qui émigrent en masses. L’idée de leur mission civilisatrice en Extrême-Orient les pousse. C’est une race de raisonneurs qui par orgueil national a su déjà, au cours de son histoire, faire bien des sacrifices. C’est la tête qui mène chez ces conservateurs qui par moments deviennent des révolutionnaires radicaux. Mais certainement le plus gros sacrifice que leur imposera la victoire sera de vivre hors du Japon, car dans ces îles, pendant des siècles, il s’est formé entre l’homme et le paysage une infinité de liens ténus et vivants, douloureux à rompre.