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goût de cette race de raisonneurs et en même temps de visuels, vivant assez détachés de la réalité, un peu comme dans la brume d’un rêve, mais qui sans cesse retournent à ces chers paysages pour en détacher de courtes esquisses symboliques, de brèves peintures de leurs abstractions ; ainsi le mathématicien recourt parfois au tracé d’une courbe pour symboliser quelques-unes des variations de la fonction qu’il étudie.

Toute leur vie morale est associée aux paysages de leur pays. Le Samuraï prend pour symbole de vie et de mort les fleurs de cerisier qui éclosent et tombent sur les collines de Yoshino. Pour la prédication, le Bouddhisme a tiré de l’instabilité des choses, fuite des saisons, mouvements des astres, écoulement de l’eau, passage des nuages, des images innombrables. À un précepte est toujours accolé une image ; parfois un feuillet du diptyque manque ; dans beaucoup de hokku, le petit tableau reste seul à décrire, à suggérer le précepte.


    aussitôt dans toutes les classes de la société — même les classes inférieures. Que ce goût subsiste général, les poésies de simples soldats aussi bien que de princes, et du Mikado, composées à propos de la guerre, citées et qu’à M. Noël Péri dans son article « Fleurs de Cerisier » (Cf. la Revue de Paris du 1er septembre 1905) le prouvent. Quant aux jardins célèbres de Kyôto ils ont été admirés, étudiés, copiés par des générations, par des gens de toutes classes. Bien plus il n’est pas d’enfant qui n’ait dessiné et construit son hakoniwa dans un plat ou un pot de fleurs — copie miniature d’un jardin connu, avec ses sentiers, ses ponts courbes, ses collines, ses lanternes de pierre, ses pins, et les poissons dans l’étang.