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pas les envahisseurs orientaux, mais les occidentaux envahis[1]. » La formule est aussi vraie de la guerre qui s’achève.

L’Europe continentale est restée sur le souvenir de l’Asie de Gengis-Khan, unifiée, organisée pour de grandes expéditions. D’où vient cet anachronisme ? C’est que, depuis le XIIIe siècle, les communications par terre, jadis actives, entre l’Europe et l’Asie orientale, furent rompues. L’empereur mongol résidant à Pékin, la sûreté des deux grand’routes ne fut plus assurée : celle du Pé-Lou (Pentapole) était interceptée sans cesse par des révoltes, celle du Nan-Lou (Hexapole) fut à la discrétion des sultans de Transoxiane autonomes ; puis l’Islam s’interposa comme un écran entre l’Orient bouddhique et l’Europe chrétienne ; les Turcs enfin bouchèrent les routes de terre, et aussi la route de l’Euphrate qui ouvrait la route de mer jusqu’à Canton. Ainsi séparés, les deux mondes pendant des siècles s’ignorèrent ; les rapports par mer depuis un demi-siècle, depuis les guerres de 1840 et 1860, n’ont pas suffi pour rendre familières à l’Europe les choses d’Extrême-Orient,

  1. L. Cahun. Introduction à l’Histoire de l’Asie, p.355 et suiv.