Page:Aubert - Américains et Japonais, 1908.pdf/375

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chinois et aux Japonais, et les Philippins, mous et paresseux, eussent été étouffés. Une domination japonaise mettrait fin aux destinées de cette race : il ne serait plus question d’assemblée philippine, de commissaires philippins collaborant au gouvernement, d’écoles élevant les indigènes au rang d’instituteurs et d’employés, les préparant à l’agriculture ou au commerce.

La politique du Japon à Formose et en Corée donne aux Philippins la mesure des libertés et des privilèges qu’il a coutume de laisser aux pays qu’il protège[1]. Au surplus, les Philippins croient former un peuple à part en Asie ; ils n’identifient pas leur sort à celui des autres Extrême-Orientaux ; ils ne sont pas sans quelque mépris pour le peuple japonais. Dressés pendant des siècles aux sentiments chrétiens et aux préjugés les plus anachroniques, ils ont gardé du règne des moines le mépris des païens. De tous les Jaunes qui imitent les Européens, c’est eux les représentants les plus anciens, les plus achevés de la civilisation occidentale. Sans doute, en bons Orientaux, ils ont pris leur part aux victoires des Jaunes : ils admirent le Japon, le craignent et reconnaissent que ses succès viennent de son européanisation, mais ils s’estiment eux-mêmes trop européanisés pour accepter sa tutelle.

  1. Les tentatives officielles pour diriger une émigration japonaise à Formose ont échoué. L’île est non pas une colonie de peuplement mais une colonie d’exploitation, — au profit du Japon plus que des indigènes. Les Japonais, officiellement et privément, vivent à part de ces frères jaunes qu’une police tracassière et brutale surveille. Élèves japonais et élèves indigènes ne fréquentent pas les mêmes écoles, et les élèves indigènes ne vont que dans des écoles primaires. L’île n’est pas complètement pacifiée.