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courage ; les Japonais, fiers d’avoir vaincu, non pas seulement parce que les plus forts, mais parce que moralement les meilleurs, exaltaient leurs antiques vertus : ce n’était pas le moment de risquer le reproche d’ingratitude en attaquant les États-Unis.

Mais, très fort au début du conflit, cet appel à la fierté nationale n’a-t-il pas perdu à la longue un peu de son prestige ? Une année d’antijaponisme aux États-Unis a sans doute allégé dans le cœur des Japonais la crainte de paraître ingrats.

Quand ils attaquèrent les Russes, outre le désir de forcer le respect de l’Europe encore méprisante et de faire prévaloir leur influence à Pékin, les Japonais visaient la Corée et la Mandchourie : quels avantages précis de gain ou de conquête pourraient-ils escompter d’une victoire sur les Américains ?

Parmi les journaux américains, les uns disent : Les armements du Japon ne sont pas en proportion de ses finances ; ne fera-t-il pas la guerre pour de l’argent ? Les autres répondent : À peine remis de sa guerre contre la Russie qu’il dut interrompre faute d’argent, le Japon ne peut se lancer maintenant dans une nouvelle guerre. — Guerre causée par besoin d’argent, guerre empêchée par manque d’argent : que penser de ces deux opinions contradictoires ?

La dette publique du Japon avant la guerre contre la Russie s’élevait à 1 465 239 000 francs[1]. Les emprunts

  1. Sur tout ceci, cf. les études documentées sur le Développement économique du Japon et Le Commerce extérieur du Japon en 1900, par G. Dauphinot, chef du service commercial à la Direction de l’Agriculture. Gouvernement général de l’Indo-Chine. Bulletin économique, Hanoï, janvier-février et août 1907.