Page:Aubert - Américains et Japonais, 1908.pdf/351

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’enquête officielle de M. Ishii a prouvé que la question japonaise dans l’Ouest américain n’était plus seulement une question de coolies et de main d’œuvre, mais une question de capitalistes et de propriétés.

Il y a donc de gros intérêts japonais à protéger qui seraient menacés de ruine si l’immigration japonaise était complètement arrêtée. L’avantage de ces propriétaires ou fermiers japonais en Californie sur leurs concurrents blancs, tenait à la main-d’œuvre abondante, bon marché et habile de leurs compatriotes, et ce ne sont pas des Blancs, Irlandais, Italiens ou Français qui remplaceront les travailleurs japonais : leurs préjugés de races les empêchent de s’embaucher au service de maîtres jaunes. La solution qui consisterait à laisser partir du Japon le nombre de travailleurs nécessaires à ces entreprises, sur certificats délivrés par les autorités américaines, est impraticable : elle violerait l’anti contract-labour law et il faudrait un sérieux contrôle pour empêcher que les Japonais ainsi importés ne s’échappent vers d’autres affaires ou métiers américains. Chaque entreprise japonaise deviendrait vite un tonneau des Danaïdes, toujours tari, bien que sans cesse on l’abreuve.

Les Japonais estiment qu’ils sont indispensables aux Hawaï, où sans eux King Sugar dépérirait[1], au Canada, en Californie, où les fruits pourriraient sur les arbres, où les chantiers de grands travaux vaqueraient et, dans les villes, les petits métiers que n’exercent pas les Blancs. Consentir à l’exclusion des

  1. Il suffit qu’aux Hawaï on ait un absolu besoin de Japonais, pour le Canada, le Mexique et les États-Unis continuent de recevoir ces émigrants.