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élèves ingénieurs, des étudiants médecins ou commerçants, des officiers de terre et de mer.

On dira : les émigrants japonais sont surtout des campagnards[1] ; au Japon, l’agriculture qui occupe encore plus de 60 p. 100 de la population totale, emploie des méthodes si surannées que plus de la moitié des terres arables ne sont pas encore cultivées, or, pour ces campagnards, pour ces gens de rizières, la Corée, terre à riz, doit avoir plus d’attraits que l’Amérique. Mais les compagnies d’émigration se chargent de populariser l’Amérique, et la proportion des Japonais agriculteurs aux Hawaï ou en Californie[2] est très forte. Au Japon même les campagnards gagnent les villes, attirés par les hautes payes de l’industrie, et l’Amérique est au bout du chemin que suivent les gens des rizières vers les usines des villes ; l’émigration vers Honoloulou ou San Francisco prolonge le mouvement qui les porte vers les salaires industriels. N’est-il pas naturel qu’une fois déracinés de leur terroir ils aillent dans les pays de climat tempéré où on leur promet des emplois immédiats, des salaires énormes, doubles ou triples de ceux qu’ils pourraient jamais gagner au Japon[3], où ils pourront, comme ils disent, « learn English » et apprendre un métier. Dans quatre ou cinq ans, ils reviendront au pays avec des économies.

L’industrie naissante au Japon jettera en temps de

  1. Du département de Hiroshima, par exemple, sont partis en 1905 3 500 paysans, et 6 478 en 1906. On estime à 40 000 environ le chiffre total des émigrants fournis jusqu’à ce jour par cette préfecture. Le mouvement est important aussi dans la province de Kyushyu.
  2. Cf. pp. 148 sqq.
  3. Cf. pp. 167 et 172.