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chemin de fer et ne s’arrête que dans les villes. Ils sont là, remuants, importants ; les femmes abondent ; les soldats aussi. En Mandchourie comme en Corée, ce monde se presse l’un contre l’autre, de-ci de-là, pas loin du rail, en colonies de plusieurs centaines d’habitants. À Antoung, le téléphone, le télégraphe, deux banques, un magnifique hôtel des postes qui ressemble à un grand temple japonais proclament l’entrain et la confiance de la colonie japonaise[1]. Mais il y a aussi des déconvenues et des retours au Japon : plutôt que des colonies de peuplement, Corée et Mandchourie sont destinées à devenir des colonies d’exploitation, des marches économiques et militaires, indispensables aux Japonais pour surveiller et conquérir pacifiquement la Chine du nord, la Mandchourie du nord et la Sibérie. Le travailleur japonais y trouve des salaires plus hauts qu’au Japon, mais ses emplois y sont souvent temporaires et il n’y est plus protégé, comme au Japon, contre les concurrents coréens et chinois prêts à travailler à meilleur marché que lui. Car c’est à la main-d’œuvre chinoise que l’employeur japonais a souvent recours : « En Mandchourie, des terres, grandes plusieurs fois comme les terres d’une ferme japonaise, sont cultivées par des fermiers cinq fois moins nombreux qu’au Japon. On supplée ces bras par des chevaux, des bestiaux et des travailleurs du Chantoung. » Les Japonais eux-mêmes reconnaissent que, plus que la culture, c’est le commerce, l’exploitation des mines, des forêts, les entreprises de

  1. Monthly consular and trade reports, december 1906, n° 315, pp. 32-33.