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sa volonté, sa curiosité, son ambition raisonnée. Cette Amérique ne lui est pas une terre de séjour, un paradis : c’est un pays d’exil, une maison d’éducation, où il ne va que pour étudier la dernière édition de la Somme des vérités industrielles et scientifiques de la civilisation occidentale et aussi chercher les plus hauts salaires que lui puisse réserver l’industrie. Ouvriers, étudiants, hommes de science, capitalistes, soldats, marins, tous se passionnent pour tout ce qui est américain ; mais tous songent aux douces heures de flânerie ou de gloire que leur assureront au Japon leurs économies ou leurs acquisitions américaines.

Car tous se réservent ; aucun ne s’abandonne. De tout ce qu’il voit, chacun choisit ce qui lui convient ; le reste, il le laisse. « Il est tout disposé à apprendre de n’importe quel instructeur tout ce qui peut lui servir ; mais tout ce qu’il apprend et acquiert est pour le Japon. Il n’a ni attachement ni affection sauf pour son peuple et pour sa terre. Son patriotisme, sa disposition à mourir joyeusement pour le Mikado est une vertu, mais qui ne le dispose pas à devenir citoyen américain. Son industrie, sa tempérance, son ambition sont des vertus, mais qui ne comptent pas pour l’Amérique[1] » Exilés pour un temps ils se retournent sans cesse vers leurs îles ; c’est une race envoûtée dans une tradition et qui s’est

  1. Interview de O. A. Tweitmoe, président de la Japanese and Korean Exclusion League, publié dans The World-to-day, décembre 1906. Cf. aussi, Hon. J. Kahn (of California), House of Representatives, 18 février 1907 « Si jamais une guerre survenait entre nous et le Japon, les sympathies, l’influence et l’aide des Japonais d’Amérique iraient à leur terre natale. »