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Chinois en Chine, Américains en Amérique, Japonais toujours : sous ces déguisements, leur souplesse à prendre tous les dehors de la civilisation des pays où ils séjournent, inquiète Américains et Chinois. Cette affectation d’américanisme exaspère les Américains plutôt qu’elle ne les gagne. Les plus haïs des Nègres par the man in the street, ce ne sont pas les braves bêtes du black belt, couleur de la terre noire sur quoi ils vivent passivement courbés : c’est le Nègre endimanché qui, un pli au pantalon et les pieds vernis, s’en va à la ville faire le beau et minauder en roulant ses gros yeux, le Nègre qui joue au foot-ball ou au base-ball, et surtout le Nègre d’université. Pareillement, comme un veston ne change ni la couleur de peau ni la stature des Japonais et qu’au su de

    Chinois, porter les mêmes robes, vivre de la même nourriture, habiter dans les mêmes maisons, s’adapter aisément et volontiers à l’entourage chinois et éviter ainsi de heurter les préjugés des Chinois.» Rapport du secrétaire chinois de la légation américaine à Pékin. Foreign Relations of the U. S. Washington, 1906, p. 199. À quelques kilomètres de Shanghaï, le collège japonais de Tun-Wen, fondé à la suite du traité de Simonoseki, prépare des jeunes gens à la propagande commerciale et politique en Chine. Il reçoit, au nombre de 300 chaque année, des Japonais qu’entretiennent leurs préfectures. Le programme est divisé en cycles : au terme de chacun d’eux l’élève part pour un « voyage d’investigations ». Les élèves du cycle politique laissent pousser leurs cheveux, puis les nattent et se rasent le haut du front : Chinois d’apparence, ils pourront dans leurs voyages d’informations passer partout. — Cf. une correspondance du Daily graphic, résumée par Le Temps, 9 novembre 1906, et les photographies de l’Illustration, 8 juin 1907. Aux États-Unis, un des tours les plus fréquents des Japonais était d’entrer dans une « gospel society » sous prétexte d’étudier la parole du « White man’s God ». Quand ils avaient appris assez d’anglais, ils quittaient subitement le pasteur ou révérend et les laissaient scandalisés de voir que ces Bouddhistes et Shintoistes avaient feint de se christianiser « for revenue only » ou pour se préparer « to insidiously work into american ways ».