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Au Blanc syndiqué, le Jap inspire une extrême défiance : ouvrier intelligent, il essaye d’entrer dans une fabrique ; une fois dans la place, il se faufile dans tous les services et les étudie ; ambitieux et souple, il fera silencieusement la conquête de l’entreprise et en deviendra le patron. Alors, comme ouvriers, il embauchera non des Blancs, mais des Japonais. À la lutte économique, il applique la méthode des coups de main célèbres dans l’histoire du vieux Japon : quelques-uns des 47 Ronins, déguisés en artisans, travaillent dans la maison de l’homme qu’ils veulent tuer. Après deux années de préparatifs, une nuit, à l’improviste, sûrs de leur coup, ceux qui sont dans la place appellent leurs amis et tous ensemble coupent la tête de leur ennemi. Les estampes de cette histoire fameuse peuvent servir à illustrer le péril japonais tel que les syndiqués blancs l’imaginent.

« Si l’antijaponisme est devenu si violent, ce sont des Français, des Anglais, des Allemands, établis depuis peu de temps aux États-Unis, qui en sont la cause[1]. » Il faut avouer que ce ne sont pas les meilleurs représentants des races blanche et jaune qui se rencontrent et se heurtent dans cet Ouest américain. D’Europe les travailleurs apportent déjà les préjugés de la supériorité du Blanc et d’un péril jaune ; sitôt aux États-Unis, ces préjugés s’exaspèrent, tant les races y sont diverses et tant les Américains en place

  1. Tôkyô Keizai Zasshi, la Revue économique de Tôkyô, 20 octobre 1906.