Page:Aubert - Américains et Japonais, 1908.pdf/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le fermage est la seule entreprise qui puisse, ce me semble, être tentée avec profit en Amérique par les Japonais. Dans la grande industrie, les Américains ont des capitaux et un matériel énormes, et s’efforcent de réduire le coût de la production. Les progrès dans l’emploi économique des machines est très frappant, mais en agriculture ces Américains sont incapables d’user de pareilles méthodes ; aussi ne discutent-ils pas les hauts prix que comparativement ils payent pour leurs légumes et leurs grains. Les grandes industries ne leur laissent guère le temps de penser aux autres entreprises. C’est donc comme agriculteurs que les Japonais ont le plus de chance de réussir aux États-Unis… Un fermier japonais aux États-Unis peut produire sa nourriture, légumes et riz, si bien que le coût des autres articles qui lui sont nécessaires ne doit guère dépasser 30 sen (15 sous) par jour ; ainsi, avec un salaire de 30 yen par mois (75 francs), un travailleur peut mettre de côté 20 yen (50 francs). Pour toutes les tâches qui exigent des doigts déliés, les Japonais sont plus adroits que les Américains. À faire la vendange ils peuvent gagner 6 yen (15 francs) par jour. Il y a donc un avantage évident à employer des Japonais dans la grande culture…

Dans les ranches de Californie, ce sont des Japonais qui ramassent et récoltent les prunes, les poires, sèchent les fruits et travaillent à les mettre en conserves[1]. Au travail minutieux et soigneux de la culture fruitière et maraîchère, le Jap est préparé par le travail dans les vallées de son pays où toute culture est un art ; aussi excelle-t-il à produire des fraises, des pommes de terre hâtives, des fleurs, à cultiver la betterave, les asperges, le céleri. À Fresno, ils ont presque le monopole de la culture des vignes : « Au moment des vendanges, ils y sont plus de 5 000. Les

  1. La conserve des fruits est l’industrie la plus importante de l’État.