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vitrines des pièces de musée ou de construire des systèmes d’idées mais de concilier une humanité du riz et une humanité du pain, une humanité bouddhique et une humanité chrétienne.

Pourtant il est des exemples d’Occidentaux et d’Orientaux vivant côte à côte, remarquent les Anglais qui, d’Angleterre, s’enorgueillissent du gouvernement de centaines de millions d’Hindous et de quelques millions de Chinois par quelques milliers de leurs compatriotes. Et, bien que les Américains, à cause de la question nègre, gardent moins d’illusions sur la possibilité d’une vie en commun avec des gens de couleur, en Nouvelle-Angleterre, on estime que les Californiens, aussi bien que les gens du Sud, exagèrent cette impossibilité.

Les Canadiens, les Australiens répliquent que la vie même des fonctionnaires anglais de l’Inde est la preuve que si l’Anglo-Saxon est le mieux fait pour gouverner les races de couleur, il est le moins fait pour partager leur vie : dans leurs settlements éloignés de plusieurs milles des villes indigènes, les gentlemen du Civil Service, aristocrates hautains et bien payés, n’ayant pas à travailler de leurs mains, n’entretiennent des rapports avec les indigènes que pour les contrôler ; leur service fait, ils quittent le pays, sans avoir renoncé à leurs habitudes ou à leurs idées d’Europe. Au contraire, partout où non plus des fonctionnaires dans des colonies, mais des travailleurs blancs, citoyens de démocraties, ont à peiner à côté de travailleurs jaunes, les avis sont unanimes : impossible de vivre en compartiments étanches ; les races se mêleront ou les Blancs céderont la place. Or les Blancs que le besoin de gagner leur pain rapproche