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fédéral a préféré négocier plutôt que d’attendre un jugement, c’est qu’il n’était pas sûr de gagner la partie et tout jugement aurait compliqué l’affaire : les cours donnant raison aux gens de San Francisco, la difficulté avec le Japon restait entière ; le gouvernement fédéral l’emportant, comment les gens de Californie auraient-ils accepté la sentence ? Dans l’un et l’autre cas, la menace d’un appel au soldat pour mater les Californiens eût été nécessaire. Mais qu’auraient dit tous les États de l’Union limités dans leur souveraineté, et surtout les États du sud, qui ne cessent de prendre, à l’encontre de la Constitution remaniée par Lincoln, des mesures pour priver les Nègres du droit de suffrage[1] ?

  1. De décembre 1906 à février 1907, depuis le jour où le président Roosevelt dans son message eut donné tort aux Californiens, jusqu’au moment où la question de l’immigration japonaise supplanta la question des écoles, le topique de discussion dans les universités, les journaux, au Congrès, comme dans les civic, fraternal and labor societies, fut le treaty-making power : « À supposer que le traité de 1894 eût la signification que le gouvernement du Japon lui donnait, le gouvernement des États-Unis avait-il le pouvoir de conclure avec une nation étrangère un traité qui fût supérieur aux lois de l’État de Californie et qui les contrôlât ? » Le secrétaire d’État, M. Root prouvait par des textes l’absolue suprématie du treaty-making power aux États-Unis sur toutes les constitutions ou législations d’État. Sénateurs et Représentants de l’Ouest et du Sud la niaient : Hon. I. Rayner (of Maryland), Hon. J. M. Gearin (of Oregon), Hon. C. A. Culberson (of Texas) au Sénat, les 12 décembre 1906, 7 janvier et 16 février 1907 ; Hon. S. Sherley (of Kentucky), Hon. E. A. Hayes (of California), Hon. G. G. Gilbert (of Kentucky), Hon. E. Y. Webb (of North Carolina) à la Chambre des Représentants, les 22, 23 janvier, 12, 16 février 1907. Ce ne fut pas simplement une discussion académique : ce treaty-making power met en jeu la double souveraineté des États et de la Nation qui, depuis plus d’un siècle, domine la politique des États-Unis. L’article 10 des amendements à la Constitution reconnaît que « les pouvoirs non délégués aux États-Unis, et non interdits aux États par la Constitution sont