Page:Athanase d’Alexandrie - Vie de saint Antoine, trad Rémondange.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 25 —

devant l’éternité ; dans le monde, toute chose se vend à juste prix et les échanges se font entre valeurs égales ; mais la vie éternelle s’achète à vil prix. L’Écriture dit en effet : « Les jours de la vie de l’homme sont de soixante et dix ans ; dans les plus forts, de quatre-vingts ans, et au delà peine et douleurs. (Ps. lxxxix, 10.) » Si donc nous persévérons pendant quatre-vingts ans ou cent ans au plus dans la vie ascétique, pour ces cent ans nous n’aurons pas seulement cent ans de béatitude, mais l’éternité, et lorsque nous aurons travaillé sur la terre, notre héritage ne sera pas sur la terre, mais dans le ciel, et après avoir laissé ce corps corruptible, nous en recevrons un incorruptible. Ainsi donc, mes enfants, ne nous lassons pas et ne nous plaignons pas de trop attendre ou de trop faire, car les souffrances du temps présent n’ont aucune proportion avec la gloire qui sera un jour révélée en nous. (Rom., viii. 18.) En regardant le monde, ne croyons pas que nous avons renoncé à quelque chose de grand, car le monde entier n’est rien à côté du ciel. Quand même nous serions les maîtres de toute la terre et que nous renoncerions à toute la terre, rien ne serait comparable au royaume des cieux ; c’est comme si l’on donnait une drachme de cuivre pour cent drachmes d’or. De même celui qui, maître de toute la terre, y renoncerait, ne perdrait pas grand’chose, mais recevrait le centuple. Si donc toute la terre est loin de valoir le royaume des cieux, celui qui abandonne quelques arpents de terre ne perd presque rien ; abandonnerait-il même sa maison et tout son or, il ne doit pas s’en glorifier ou s’en affliger. Songeons d’ailleurs que si nous n’y renonçons pas par vertu, il faudra les perdre par la mort et souvent même au profit de ceux qui nous plaisent le moins, comme dit l’Ecclésiaste (iv, 8.) Pourquoi donc ne les abandonnerions-nous pas par vertu pour hériter du royaume des cieux. C’est pourquoi, que personne ne se laisse envahir par la cupidité. À quoi bon acquérir