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VII

LA LIONNE


Avez-vous vu la lionne qui était au jardin des Plantes en l’an 1859 ? Celle-là, je l’ai vue, moi, Dumanet, qui vous parle, ou si je ne l’ai pas vue, c’était sa cousine germaine, sa fille, ou sa nièce, enfin une de la famille. Elle était grande, mince, allongée, à peu près comme la fille aînée de M. le marquis d’Écorcheville, qui regarde les hommes de haut, à ce qu’on dit, parce qu’elle a un demi-pied de plus que les plus belles femmes de l’arrondissement de Libourne.

Eh bien, notre lionne, celle que Pitou venait de faire veuve, était à peu près comme ça, dans son genre. Quant à sa figure, il y en a peut-être de plus jolies… Vous savez, ça dépend des goûts… Elle avait un nez carré par le bout comme tous ceux de la famille, des yeux méchants comme ceux de la mère Cascarou, de Béziers, l’aubergiste, qui donne quatre-vingt-quinze soufflets par an à ses servantes et qui en reçoit trente ou quarante à son tour. Comme lui dit un jour le juge de paix : « Ma chère, on ne peut pas toujours donner ; il faut recevoir quelquefois. Sans ça, on se ruinerait. »

Au-dessus des yeux, au milieu du front, il y avait une fente terrible, la même qu’on voit chez toutes les méchantes bêtes de la création : c’est la rue de la colère. Quand une dame vous regarde et que vous