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LA CHASSE AUX LIONS

une chose si lourde, au dire de Pitou, qu’il n’y a pas plus lourd que ça dans la nature. D’ailleurs, comme il dit : « Tu es orateur, Dumanet, tu parlerais cinq heures de suite sans débrider. Va donc de l’avant ; ce que tu feras sera bien fait ; ce que tu diras sera bien dit. »

Voyant ça et que je ne risque pas d’être blâmé par mon Pitou, je dis à M. Chambard :

« Mon capitaine ! »

Lui se retourne :

« C’est toi, Dumanet ?

— Oui, mon capitaine, c’est moi et Pitou.

— Eh bien, qu’est-ce que vous me voulez ?

— Un congé de deux jours, mon capitaine, si c’était un effet de votre bonté.

— Pour quoi faire ? »

Ah ! voilà ! Je me grattais la tête, et Pitou aussi ; c’est-à-dire, il grattait la sienne et moi la mienne. Si nous disions notre idée au capitaine Chambard, il était capable de nous la prendre. Dans un pays comme celui-là, où les lions ne sont pas aussi communs que les perdreaux en France, ça pouvait le tenter, lui et ses amis, une chasse au lion.

Il demanda encore :

« Dis tes raisons, Dumanet.

— Mon capitaine, voilà. Pitou et moi, nous avons une fameuse idée, mais nous avons peur, si quelque camarade venait à le savoir, qu’il voulût nous la voler. Ça fait que nous avons de la peine à nous confesser.

— Eh bien, confessez-vous, ne vous confessez pas, ça m’est égal. Mais, si vous ne dites pas pourquoi, vous n’aurez pas de congé. »

Voyant ça, je dis tout bonnement notre affaire, que nous avions vu et entendu le lion, qu’il était dans la montagne, enfin tout ce que j’ai déjà raconté.

Les officiers m’écoutaient comme si j’avais débité l’histoire la plus intéressante, et le capitaine Chambard les regardait du coin de l’œil,