Page:Association des écrivains et artistes révolutionnaires - Commune, numéros 5 à 10, janvier à juin 1934.djvu/476

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Un de ces quatre matins je le balancerai dans la flotte, lâcha Riera.

— On en a marre, gronda Hernandez.

— Il lui faut une raclée, dit Vigo.

Pépé Anton’ riait. Car lui, un vieux, avait exécuté ce que ces braillards se proposaient chaque jour.

Ils se mirent à l’ouvrage. Vers huit heures, Palau arriva ; en retard, ce qui surprit les gars. Il ne les engueula pas aussitôt comme de coutume ; il s’assit à l’avant et griffonna sur un carnet, d’un air absorbé. Pépé Anton’, qui l’observait, pensait : « Il sera sage. »

Et puis, le lendemain, Palau recommença à hurler, à tourner comme un moucheron autour des hommes. Ça n’allait pas assez vite ! ils ne tapaient pas assez fort ! et des sous-entendus, des menaces de renvoi, bref il semblait vouloir se rattraper de son silence de la veille. Tout à coup, en pleine crise, il lança :

— Vous êtes des propre-à-rien ! Tous ! Ça va changer ! Alors, calme, Portalis posa sa masse.

— Tu as fini de nous faire chier ? dit-il. Qui travaille, ici ?

— Moi, je suis là pour commander. Je ne veux pas que vous me tutoyiez, Portalis.

— Le propre-à-rien, c’est toi ! On n’a pas besoin d’un bout-de-cul de surveillant. File reprendre tes écritures comme hier.

— Je suis le seul chef !

— Ferme ta gueule ! Non ?

Portalis projeta son poing en avant et Palau roula à terre. Les compagnons de l’Andromède n’auraient pas osé le corriger ainsi, mais Portalis se fichait de tout, un beau jour il quitterait l’île. Ils regardèrent, en riant, Palau se relever, s’essuyer, se tenir le menton.

— C’est une mauvaise série, glissa pépé Anton’.

— Quintana vient ce matin, gronda Palau, la bouche pleine de rage, le regard haineux.