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XV
du sonnet

charon.

Amour m’a fait mourir. Iamais dans ma Nacelle
Nul fuiet à l’Amour ie ne conduis à val.

magny.

Et de grace, Charon, conduy-moy dans ta Barque.

charon.

Cherche vn autre Nocher, car ny moy, ny la Parque,
N’entreprenons iamais ſur ce Maiſtre des Dieux.

magny.

Piray donc malgré toy, car ie porte dans l’âme
Tant de traits amoureux, tant de larmes aux yeux,
Que ie feray le Fleuue, & la Barque, & la Rame.


Ie ne fçay pas ce qu’en dira maintenant noſtre Cour ; mais ie ſçay bien que toute la Cour du Roy Henry ſecond en fit tant d’eſtime, que tous les Muſiciens de ſon temps, iuſques à Orlande, trauaillerent à l’enuy à le mettre en muſique, & le chantèrent mille & mille fois, auec vn grand applaudiſſement, en la preſence des Roys, & des Princes. »

On voit par cette citation que c’était déjà la coutume des courtiſans, ſous Henri II, de conſigner ſur leurs Tablettes les vers à la mode ; c’eſt peut-être là le commencement de la manie des Albums.

Quant à la fantailie de mettre les Sonnets en muſique, ce qui peut ſembler bizarre en raiſon de la forme même du poème, il paraît que ce fut auſſi une