Page:Asselineau - Le Livre des ballades.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XI
DE LA BALLADE

Lorſque, au commencement de ce fiècfe, on fentit la néceffité de rendre à la langue poétique l’énergie & l’éclat qu’elle avait perdus pendant cent cinquante ans de diſcuſſions & de luttes, on ſe retourna naturellement vers les époques de poéſie floriſſante. On alla rechercher la tradition de l’art oubliée près des derniers lyriques, ceux de la Renaiſſance & du règne de Louis XIII. Le beſoin de regagner de la ſoupleſſe & de la préciſion fit reprendre en goût les vieux rhythmes, exercices de la rime & de la meſure. Le Sonnet, le Rondeau abandonnés après Voiture & La Fontaine reparurent ; le Triolet même retrouva des dévots. La Ballade ſeule fut négligée, ou plutôt fut omiſe, non par dédain, j’aime à le croire, mais par mégarde, ou du moins, par malentendu. On paſſa près d’elle ſans la reconnaître,

Délaiſſée dès le xviie ſiècle, au temps de Molière, alors que le Rondeau & le Sonnet floriſſaient encore, la Ballade n’était pas ſeulement oubliée ; elle était méconnue. Elle n’avait eu ni un Benſerade, ni un Voiture pour illuſtrer ſon déclin. Une étrangère avait pris ſa place. & l’avait ſi bien remplacée, qu’on ne la connaiſſait plus.

Clairs de lune, châteaux en ruine hériſſant