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Vie de Charles Baudelaire.

les liſtes qu’il a laiſſées d’œuvres à réimprimer. Au fond, le journaliſme n’était pas ſon affaire. Sa nature ariſtocratique l’éloignait de ce pugilat en public qui rappelle l’arène & le cirque banal. Auſſi les bureaux du Corſaire furent-ils ſurtout pour lui un ſalon de converſation.

Il s’y lia particulièrement avec Champfleury, dont il reſta l’ami fidèle, & avec Th. de Banville, pour lequel, dès l’apparition des Cariatides il avait conçu une ſincère admiration. Cette admiration, il l’a exprimée plus tard avec autorité dans la notice à laquelle j’ai déjà fait alluſion en commençant. Remarquons qu’il ne s’eſt jamais peut-être rencontré de plus complète oppoſition de génie & de nature qu’entre ces deux poëtes, d’ailleurs égaux en talent. De façon qu’on peut dire que chacun ſe complète par l’autre, & qu’entre eux l’admiration, de même que l’amitié, vivait de contraſtes.

Je ne puis me diſpenſer de citer ici le dernier paragraphe de cette notice, où Baudelaire ſe juge lui-même en jugeant ſon complémentaire :

« Beethoven a commencé à remuer les mondes de mélancolie & de déſeſpoir incurable amaſſés comme des nuages dans le ciel intérieur de