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Vie de Charles Baudelaire.

dans le calme. Ceux qu’irritaient ſes ſarcaſmes & ſes myſtifications, n’ayant plus affaire qu’au poëte et à l’écrivain, ſont revenus à lui ; n’ayant plus à le craindre, ils l’ont admiré ſans préoccupation. Ils ont commencé à le comprendre, quelques-uns peut-être par peur du ridicule qu’on encourt à Paris à ne pas goûter ce que l’élite de la ſociété approuve. C’eſt en effet une excellente pierre de touche de l’intelligence d’un homme que ſes opinions ſur une belle œuvre ou ſur un talent conſacré. « Il eſt fâcheux pour un poëte, diſait Pierre de l’Eſtoile, de ne point admirer M. de Gombaud ni moi. » Que de gens aujourd’hui feignent d’admirer Delacroix, Hugo et Beethowen, uniquement pour ne pas paraître plus bêtes que leur voiſin qui les loue, & qui ne les loue lui-même que ſur la foi d’un homme qu’il ſent ſupérieur à lui ? Terreur ſalutaire après tout ; car, pour ces eſprits naïfs, la lumière peut venir après la foi. Baudelaire participe dès à préſent au privilége de ces patriarches de l’art ; & l’on peut dire à coup ſûr que c’eſt une mauvaiſe note pour un lettré que de ne pas l’avoir compris.

Et encore ſon œuvre n’eſt pas tout ce qu’il nous