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L’ŒUVRE DE L’ABBÉ GROULX

querelles domestiques par un article d’une violence injustifiée, qui est en outre un pitoyable échantillon de judiciaire intellectuelle.

Directeur d’un service de traduction à Ottawa, M. de Montigny vit dans un milieu où, à quelques honorables exceptions près, les gens instruits — ou censés l’être — sont français à la première génération, un peu moins français à la deuxième et pas du tout à la troisième. Même ceux de la première génération sont généralement français à leur manière. Ils pestent contre Le Droit. Ils applaudiraient le gouvernement orangiste qui supprimerait par la force l’Association d’éducation. Ils sont pour les écoles françaises, mais de bonnes, de vraies — celles qui n’existent pas. Et quand on leur répond que de bonnes écoles se créent avec de l’argent, et que l’hypocrisie du gouvernement ontarien, depuis vingt ans, ressort précisément de son sournois entêtement à ruiner par la pauvreté l’enseignement qu’il accuse d’incompétence, ils répondent que cela se peut, mais qu’ils sont pour la diplomatie. Ils raisonnent du nationalisme canadien-français à peu près comme ce vieux crétin de Davis Fletcher. Au fond, ce qui leur répugne, c’est de s’avouer parents des anciens « draveurs » de Bytown et de la Gatineau, et leur diplomatie consiste le plus souvent à envoyer leurs enfants aux écoles anglaises « en attendant qu’il y ait de bonnes écoles françaises. »

M. l’abbé Camille Roy a comme critique littéraire le léger défaut de manquer lui aussi de tout sens critique. On pourrait même, sans injustice, dire qu’il n’a pas de bon sens. Il traitera de Mermet, de Michel Bibaud, de M. Hector Bernier, avec le même sérieux qu’il ferait de Racine, de Voltaire ou de Victor Hugo. Il trouve sérieusement aux romans de M. Bernier une étroite ressemblance avec les chefs-d’œuvre de la littérature française. Il