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M. ÉMILE NELLIGAN

les, de fines trouvailles comme celle qui termine la Romance du Vin que nous avons déjà publiée :

 « Je suis si gai, si gai, dans mon rire sonore,
Oh ! si gai que j’ai peur d’éclater en sanglots ! »

Il a pu commettre certains excès de lyrisme, certaines audaces ; mais, on les lui pardonne en faveur de sa jeunesse et de sa belle âme. Il aime tant l’art ! il aime tant sa mère dont ses vers sont remplis ! il porte en lui-même tant d’illusions !

Il a écrit ces vers au milieu du terre à terre de la vie bourgeoise, du mercantilisme et du dédain de ceux que les subtilités artistiques ne sauraient émouvoir, et sa puissante imagination l’a fait se séparer des laideurs environnantes.

Et grâce à cette étonnante faculté d’isolement, et aussi parce qu’il a souffert, on peut lui prédire qu’il vivra heureux et marchera le front serein à travers toutes les rancunes et les bassesses humaines.


Les Débats, 6 mai 1900.