Page:Arvor - Dent pour dent, scènes irlandaises, 1906.djvu/93

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 91 —

gers. Tu t’absentes sans faire connaître l’endroit où tu vas, l’attention publique est éveillée à ton sujet. Ton changement à l’égard de William…

— Je n’ai jamais aimé William, interrompit Colette.

— Un jeune homme si bien ! exclama mistress Buckly en joignant les mains, et si riche !

— Il ne s’agit pas de cela, reprit brusquement le paddy. William est un parti inespéré, tu l’as accepté volontairement ; il est jeune, intelligent, beau garçon, je ne comprends pas que tu aies de la répugnance à l’épouser, sans parler de l’intérêt de ta famille qui aurait tant à gagner à ce mariage. Est-ce que Tomy Podgey serait pour quelque chose dans tout ceci ?

— Je n’ai jamais songé à épouser Tomy, fit Colette en rougissant.

— Tomy Podgey est dans le pays, j’en suis sûr, et tu le vois. Il ne sera pas dit que pour cet aventurier, échappé à la potence, tu perdras ton avenir et celui de ta famille ; à partir de ce jour tu ne sortiras plus sans mon autorisation jusqu’à ton mariage, qui aura lieu dans un mois. Pense donc que si les soupçons de la police pesaient sur nous, on nous chasserait et nous serions réduits à la mendicité.

Colette pleurait en silence, elle comprenait que son père avait raison en parlant des dangers de ses relations avec les proscrits.

— Tu m’as bien compris, reprit Buckly, je défends absolument ces visites à la vieille Jane ; cette femme est suspecte, sa cabane est fréquentée par les contrebandiers de la montagne, on n’a rien à gagner en y allant ; sois aussi désormais plus aimable pour William, si ce mariage manque ce sera de ta faute et je ne te le pardonnerai pas.

Pendant que se passait cette scène de famille, William s’en retournait furieux contre Colette, se demandant s’il ne la laisserait pas à ses dédains. Son cœur